« Aperit et nemo claudit »
« Elle ouvre et personne ne ferme ».
Cette devise sur le blason de la ville résume tout à fait le rôle, dès le 16ème siècle, de Saint-Nazaire, cette bourgade de quelques centaines d’habitants, nichée sur un rocher à l’entrée de l’estuaire de la Loire : accueillir, grâce à ses marins « Pilotes », les navires de commerce et leur permettre de naviguer en sécurité sur le fleuve avant la remontée vers Paimboeuf ou Nantes.
A l’origine : un abri naturel, un bourg de mariniers et de pilotes
Considérons d’abord la topographie sommaire du lieu : un point de démarcation fort nettement marqué entre la Loire et la mer ; une faible mais réelle éminence granitique d’une dizaine de mètres d’altitude très détachée, très saillante à la limite extrême de l’estuaire, située à l’ouest-nord-ouest d’une autre pointe moins considérable, celle de Mindin. Les marins ont surnommé « Clef de la Loire » la ligne idéale qui sépare les eaux fluviales de celles de l’Océan, le détroit d’environ deux mille mètres de largeur entre les deux caps et c’est sans nul doute à cause de cette métaphore qu’au dessus d’un navire sous voiles, une clef figure dans les armes de la ville.
Par sa position favorable Saint-Nazaire réunissait toutes les conditions susceptibles d’attirer les navigateurs : une anse spacieuse et fort sûre de la Ville Halluard, qui s’étendait du rocher saillant de Penhouët à la pointe de Saint-Nazaire et constituait ainsi un port naturel de choix et la pointe, une protection incomparablement efficace contre les tempêtes (source A).
La ville proprement dite occupe complètement une presqu’ile essentiellement orientée de l’est à l’ouest, dont l’isthme d’à peine cent mètres de largeur, aux pleines mers d’équinoxe, s’infléchit au nord-nord-ouest. La superficie totale est d’environ quatre hectares et demi.
Sur cette surface limitée, deux cents maisons à peine, basses en général, grossièrement construites, pour beaucoup couvertes de chaume, groupées, serrées vers l’est près d’une très vieille église paraissant comme sertie dans un petit cimetière dont les vagues de l’océan lèchent les murailles. Son clocher octogonal, qui servait d’amer aux marins, se terminait non par une girouette mais par une main tendue, autre symbole d’accueil de la ville. Les habitations qui, au nord, bordent la baie de la Ville-Halluard, sont juste séparées de l’eau par des jardinets.
Au sud où jadis était le grand cimetière, se trouvent la chapelle Notre-Dame-de-l’Espérance. (source B)
Les rues sont étroites et tortueuses, reliées entre elles par une vingtaine de venelles, portant souvent le nom du propriétaire du lieu (Tartoué, Kergorre, Robert, Ordronneau, Aumont,…). Seules la Grande-Rue et la rue des Sables ainsi que la rue Neuve ont une largeur à peu près satisfaisante. Aucun grand commerce : quelques boulangeries, un boucher, un charcutier, trois ou quatre auberges et deux hôtels « le Cheval Blanc » et « la Boule D’Or », quelques échoppes. En dehors de ces quelques commerces, on pouvait aussi trouver charpentiers, serruriers, forgerons, cordonniers, tisserands. Le reste de la population était soit marinier (pilote, matelot, capitaine), soit douanier (vérificateur, receveur, brigadier…) (source B). Selon les sources il y avait marché une fois par semaine, le jeudi (B) ou le dimanche (source A).
Quelques habitations éparpillées entre l’agglomération et la Ville-Halluard ajoutent, vues de la rade, quelque importance à la cité. Au delà de l’isthme c’est la campagne émaillée de nombreux moulins à vent et d’une cinquantaine de villages ou hameaux ; beaucoup de leurs noms (souvent liés au patronyme d’un des habitants) sont précédés du mot-préfixe « ville » ou villez » (du latin « villa ») : Ville-Halluard, Ville-au-Feuvre, Ville-Etable, Villez-Martin, Villez-Blais, Villez-Thomas, Villez-Allain, etc. (B)
Retour sur le saint qui a donné son nom à la ville, la légende et les écrits.
Voici deux plans de la commune :
Le premier, anonyme et non daté, a été retrouvé par un habitant de Vannes dans des affaires de famille. On peut le situer aux alentours de 1750 compte tenu des termes employés (fief, placistre, aresne), des constructions qui y sont mentionnées et des annotations. De plus, le fort du Duc d’Aiguillon n’est pas noté car construit en 1756. C’est un document assez exceptionnel.
On nommait fief (inscrit plusieurs fois sur le plan ci-dessous), dans l’ancien droit français, du XIe au XVIIIe siècle, un mode spécial de tenure (concession) qui s’appliquait non seulement à la terre, mais à toutes sortes de biens, corporels ou incorporels, et qui fut l’institution la plus caractéristique de la société féodale. Le fief a toujours été une tenure par concession, confié en rétribution de services, c.-à-d. le contraire de la propriété libre, de l’alleu dont le possesseur ne doit ni hommage ni reconnaissance à un seigneur. Les tenures féodales furent supprimées en France par les lois abolitives de la féodalité que votèrent successivement l’Assemblée constituante, l’Assemblée législative et la Convention, notamment par le décret du 15 mars 1790.
Le second ci-dessous a été élaboré par l’auteur du site d’après une carte du cadastre de 1829. Sur ce plan le môle n’est pas encore construit. Quelques noms ont changé, comme la rue « Haute » qui est maintenant la rue « de la Vieille Eglise », la rue de la Rampe a été créée et le fort construit, les maisons du côté du Grand-Traict (qui étaient régulièrement ensevelies sous les sables) ont été rasées,…
Le bourg était relié au reste du monde par un chemin vicinal conduisant à Saint-André des Eaux et Herbignac et par la route départementale de Nantes à Guérande. C’étaient les seules routes carrossables. Sans compter qu’au moment des hautes mers d’équinoxe, la ville était pour ainsi dire une île.(C)
Au début du XVIII ème siècle, quelques villes, peu nombreuses, étaient administrées par des maires ou échevins. Les autres, comme Saint-Nazaire, étaient dirigées par la « Fabrique » qui gérait à la fois les intérêts civils et religieux de la paroisse. L’assemblée des « fabriciens » ou membres du conseil de fabrique prenait le nom de « Général ». Celui de la ville était formé par le recteur de la paroisse, le sénéchal et le procureur fiscal, deux marguilliers et une douzaine d’assistants. Conformément aux dispositions d’une ordonnance royale de 1768, le Général décide le 24 août 1788 de faire numéroter toutes les maisons de la ville sans exception .(B)
Le premier maire réel de Saint-Nazaire fut en 1790, pendant quelques temps, Jean-Pierre Dufrexou, (1749-1806) avocat de profession qui sera également député. Il avait cependant eu un quasi-prédécesseur en la personne de « noble maître François-Pierre Galliot, sieur de Cran, avocat et nommé syndic « faisant fonction de maire ». Les registres paroissiaux qui mentionnent les naissances, mariages et décès sont de plus en plus laconiques et énoncent à peine les qualités et professions des personnes. Ils ne prennent pas non plus en compte les non-catholiques. Il en sera ainsi jusqu’à l’application de la loi sur l’Etat-Civil du 20 septembre 1792 (B).
Le havre d’échouage se nommait le Portereau et s’étendait au flanc même de l’église. Des marches y descendaient. Il pouvait recevoir des bateaux modestes de 30 à 60 tonneaux qui s’amarraient à des pieux ou à des trous ménagés dans les rochers. Le havre était inabordable à marée basse. Avant la construction du môle-abri en 1835, une sorte de digue grossière, constituée de grosses pierres brutes, protégeait tant bien que mal les bateaux des Pilotes (appelés yoles) et les bateaux affectés au passage de l’estuaire.
Les deux dessins suivants de Charles Beilvaire ont été réalisés d’après des documents d’époque puisque le peintre est né en 1861. Ils représentent néanmoins un beau témoignage sur la configuration du bourg à la charnière XVIII / XIX ème siècle.
C’est à Saint-Nazaire que résident les maitres-pilotes et pilotes-lamaneurs qui, jusqu’à Paimboeuf, font pénétrer les navires en Loire. Ces marins d’élite, dont certains écrits parlent dès le XV ème siècle, sont réputés courageux et habiles. Etre pilote est le but poursuivi, l’ambition définie de la plupart des jeunes navigateurs nazairiens bien que cela fut un métier des plus dangereux lorsqu’il faut sortir par gros temps.
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Dès le XVII° siècle les usagers de la Basse Loire se plaignaient des profondeurs insuffisantes, de la mobilité des bancs de sable de la rivière Loire et qui imposaient aux navires de 300 tonneaux de décharger une partie de leur cargaison sur gabare à Mindin, Paimboeuf ou Couéron. Pour le chargement des navires le procédé était identique et cette situation était préjudiciable au commerce de Nantes. Si la capitale ligérienne voulait survivre il lui fallait de toute nécessité créer cet avant-port, déjà demandé par les négociants en 1735.
Le gouvernement de Bonaparte, préparant la lutte maritime contre l’Angleterre, devait normalement faire évoluer la situation, cherchant un lieu en Basse-Bretagne pour la construction de ses vaisseaux de 74 canons. Mais les préoccupations de la guerre continentale l’emportant sur les desseins de cette lutte maritime, rien ne fut entrepris et à la fin du XVIII° siècle, Nantes n’avait toujours pas d’avant-port. (C)
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Car il faut savoir que Saint-Nazaire ne construisait pas (encore) de navires, les chantiers étaient à Méan (dépendant alors de la commune de Montoir de Bretagne) sur le Brivet. Compte tenu de la taille de ces chantiers et du cours d’eau, les plus forts bâtiments ne dépassaient pas 600 tonneaux de jauge ce qui permettait généralement de réaliser l’armement à Nantes.(C)
Sur le recensement de 1795 soit l’an IV du calendrier républicain (disponible sur le site des Archives Départementales) on peut constater, concernant la commune de « Port Nazaire » : que la population est de 2 366 habitants mais que seulement 508 personnes résident dans la « Ville » (pour beaucoup des pilotes, des marins, des charpentiers) et 157 dans les « Villages » proches (Parc à l’eau, Prieuré, Bois Savary, Ville Halluard, Dermurie,…), soit pour la population dite agglomérée, un peu moins de 30% du total. La grande majorité sont natifs de la ville et les autres sont arrivés dans les années 1780.
Pour les noms de famille, aux côtés des Mahé, Bertho, Allançon, Audrain, Halgand… quatre patronymes semblent plus présents : Cavaro, Mollé, Tartouez et surtout Couronné.
Pour finir rajoutons que la campagne est partagée entre terres cultivables, terres marécageuses, terres sableuses et marais salants. Pornichet était alors un village intégré à la commune nazairienne mais isolée comme en cul de sac. Au delà était une vaste étendue de sables et de dunes que l’on appelait « Bôle ». Pas âme qui vive avant d’atteindre (à pied) Le Pouliguen et Le Croisic.
Voici donc la présentation de la petite commune de Saint-Nazaire, ou plutôt Port Nazaire, à la fin du XVIII ème siècle. Mais tout allait être bouleversé en quelques décennies…
Tout d’abord le môle-abri fut construit….
L’Histoire du développement de la ville débute ce 13 octobre 1822 lorsque le Conseil Municipal demande à l’Etat la construction d’un môle sur le « rocher ». Appuyé par la Chambre de Commerce de Nantes et tous ceux qui avaient des intérêts à Saint-Nazaire (négociants, armateurs, navigateurs, capitaines) le projet allait enfin aboutir par le début des travaux en 1828. La construction fut longue, il fallut apporter les pierres à l’aide de chars à bœufs qui défoncèrent la chaussée menant à Saint-Nazaire et la rue principale du bourg, ce qui provoqua des protestations (!) et des frais supplémentaires. L’ingénieur Lemierre présenta le 22 mai 1831 une modification en proposant la construction d’une cale latérale en amont du mole d’abri pour faciliter l’accostage et le déchargement de marchandises. Ainsi sept ans supplémentaires s’écouleront avant que le môle-abri, de 197 mètres de long et 6 mètres de large, équipé d’une tourelle cylindrique avec un feu blanc fixe ne soit opérationnel : ce sera le 1er janvier 1836.
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Et ce n’était là que la première étape d’un essor, qu’en 1835, les plus optimistes n’auraient guère oser rêver.(C)
… puis la construction du premier bassin
Depuis la fin du XVIII ème siècle la ville n’a pas beaucoup évoluée mais la construction du môle-abri qui vient de s’achever va être le point de départ d’un développement, semble t-il sans précédent en France.
Dès 1808 les frères Crucy, nantais d’origine, avaient élaboré un projet de bassin à Saint-Nazaire qui fut même repris en 1812 par quelques ingénieurs convaincus qu’il fallait maintenant un avant-port à Nantes. Pendant plus de trente ans les palabres agitèrent la région, Paimboeuf, Le Croisic et Saint-Nazaire voulant absolument avoir ce rôle.
La Basse-Loire continuait de s’ensabler, le trafic de Nantes périclitait et à partir de 1836 la capitale du département réclamait maintenant impérieusement un avant-port.
A la même époque les services postaux et les transports transatlantiques se développaient un peu partout en Europe avec l’avènement de la vapeur.
Nantes relance donc, en 1836, le projet d’aménagement de Saint-Nazaire ou Paimboeuf, le choix du Croisic étant laissé de côté malgré une infrastructure portuaire importante. Paimboeuf à cette époque est déjà un port aménagé avec d’importants chantiers bois et c’est une sous-préfecture de 6 000 habitants… Autant dire que la rivalité entre les deux villes va être très vive. Mais la détermination des élus nazairiens par leurs déplacements jusqu’aux ministères, les enquêtes d’utilité publique organisées d’octobre à décembre 1837 et la conclusion des ingénieurs des Ponts-et-Chaussées, Louis Plantier et Robert Cabrol, vont permettre l’homologation, le 21 avril 1838, par le ministère des Travaux-Publics, d’un avant projet de port à Saint-Nazaire.
Mais la décision prise, les travaux ne commenceront que plusieurs années plus tard après maintes hésitations, études et polémiques.
Différents projets furent ainsi présentés et étudiés. Ce n’est qu’en 1845, le 10 mai, que le projet soutenu par les ingénieurs des Ponts-et-Chaussées, Robert Cabrol associé à Charles Jégou, fut définitivement approuvé par le Ministère des Travaux-Publics. Les crédits étaient votés en juillet mais c’était sans compter sur les dernières interrogations : l’emplacement exact du bassin, sa profondeur, la configuration des digues du chenal, la longueur des quais…
Finalement la configuration définitive du bassin, validée en décembre 1847, comprenait un grand rectangle de 580 m de longueur sur 160 m de largeur, parallèle à la laisse de basse mer et muni sur le côté ouest d’une échancrure rectangle de 140 m sur 90 m imposé par le service de la Marine Nationale pour ses propres navires (car elle aussi était fortement intéressée par un port à l’embouchure de la Loire !).
L’entrée du bassin devait se faire par 2 écluses : l’une avait un sas de 60 m de long et 13 m de large, l’autre faisant 21 m de large mais sans sas. Deux jetées en maçonnerie écartées de 55 m protégeaient le chenal d’accès qu’il fallait entretenir constamment puisque situé en pleine vasière.
La construction de ce bassin était d’autant plus attendue que la loi du 16 juillet 1840 dotait Saint-Nazaire d’une ligne de paquebots transatlantiques postaux et qu’il fallait pouvoir accueillir (Voir prochain chapitre).
L’adjudication des travaux fut faite le 07 février 1848, soit 10 ans après la prise de décision concernant la construction d’un port à Saint-Nazaire ! Les travaux, dirigés par l’ingénieur Jules de la Gournerie, durèrent encore 10 ans de plus et ce n’est que le 25 décembre 1858 que le premier navire fit son entrée dans le premier bassin à flot de Saint-Nazaire.
Voici une carte d’Etat-Major relevée sur le site de l’IGN (https://remonterletemps.ign.fr/) représentant la région nazairienne vers 1850. Le môle et le premier bassin sont construits mais la ville n’est pas encore développée. On y voit bien les deux voies d’accès au bourg, la route de Guérande et la route de Méan.
Mise en service d’une ligne transatlantique postale
Les premières lignes postales avec les Amériques avaient été établies en Angleterre dès 1837. En France on sentait l’impérieuse nécessité de services analogues.
La loi d 16 juillet 1840 établit la création de trois lignes postales mensuelles de navigation transatlantiques ; Saint-Nazaire était choisie comme tête de ligne pour Rio de Janeiro au Brésil, Montevideo en Uruguay et Buenos Aires en Argentine. Mais les premiers résultats furent décevants et l’expérience momentanément abandonnée.
Une deuxième tentative fut lancée en 1845 sans plus de résultats.
Ce n’est que dix sept ans plus tard que le projet fut repris avec un certain succès. La loi du 17 juin 1857 établissait trois lignes de navigation avec le continent américain : Le Havre fut le port retenu pour la ligne de New-York, Bordeaux pour la ligne du Brésil et Argentine et Saint-Nazaire reçut la liaison vers les Antilles et Cayenne.
Par convention du 1er février 1858 et décret du 20 février c’est la compagnie Marziou, dite Union Maritime, qui prenait possession de la concession des services « Le Havre-New-York » et Saint-Nazaire-Les Antilles. Cette compagnie était patronnée par la Cie des Chemins de Fer d’Orléans mais malheureusement elle ne réussit pas à réunir tous les capitaux nécessaires, malgré l’appui de la banque Rothschild, notamment pour l’achat des premiers navires. Aussi le 16 octobre 1860, la Cie Marziou se désista de cette concession et ce sont les frères Emile et Isaac Pereire qui, agissant au nom de la « Compagnie Générale Maritime » (voir au prochain chapitre), se portèrent acquéreurs. Les deux frères s’assurant le concours d’une banque d’affaires qu’ils avaient précédemment créés, la Sté Générale de Crédit Mobilier, obtenaient une convention définitive de l’Etat le 20 octobre 1860.
Le 25 août 1861, la Cie Générale Maritime prenait le nom de « Cie Générale Transatlantique » (que l’on appellera communément plus tard la « Transat » et ponctuellement « CGT » sur ce site) et s’engageait à mettre 16 bâtiments en service dont la moitié devait être construit en France. En échange de ce service l’Etat devait payer à la compagnie une subvention de 310 000 fr par voyage d’aller-retour soit 3 720 000 fr par an et lui verser en outre une somme de 4 millions à titres d’avance.
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La 1ère ligne postale transatlantique sera la liaison « Saint-Nazaire – Veracruz » au Mexique et fonctionnera de 1862 à 1938.
Un ouvrage retraçant l’histoire de cette ligne vient d’être publié. Cliquez sur l’image pour en savoir plus.
En moins de 40 ans donc, Saint-Nazaire venait de se doter d’un môle-abri, d’un grand bassin à flot et d’une ligne postale mensuelle de paquebots transatlantiques.
Et c’est cette dernière qui allait décider du futur développement industriel de la ville…
Construction du premier chantier naval
En résumé : en 1855, les frères Péreire (Emile et Isaac) créent la Compagnie Générale Maritime (CGM) à Granville en rachetant une petite compagnie forte de quelques voiliers. Le principal actionnaire est le Crédit Mobilier (voir plus bas), banque fondée en 1852 par les mêmes frères Pereire. Cette banque jouera un rôle important, en France, dans la forte croissance économique à crédit de la période 1850 à 1857. Déjà propriétaires ou actionnaires de nombreuses sociétés de chemins de fer, ils s’inscrivent dans un courant d’industriels français qui se lancent dans de grandes entreprises sous l’impulsion de Napoléon III. Les Péreire comprennent que, à l’exemple de la compagnie anglaise Cunard, ils ont tout intérêt à se centrer sur un service de paquebots financé par des conventions postales. Napoléon III, séduit par le concept, en propose un certain nombre à l’époque, que les Péreire refusent en les jugeant trop faibles financièrement. La ligne des Amériques se retrouve ainsi attribuée à Louis Victor Marziou, qui connaît une crise dès 1860. C’est le moment que choisit Isaac Péreire pour renégocier la convention avec l’État. Ainsi la Compagnie Générale Maritime s’engage à desservir pendant vingt ans les lignes transatlantiques suivantes : Le Havre-New York (avec escale à Brest), Saint-Nazaire – Antilles – Aspinswall (ou Colon, au Panama) avec escale à la Martinique et deux services annexes pour la Guadeloupe et Cayenne : à cette époque le transport de passagers et du courrier est réalisé par les mêmes navires. Détail important et qui sera le déclencheur industriel de Saint-Nazaire : la compagnie s’engage de plus à construire la moitié de sa flotte en France soit 8 navires sur les 16 prévues pour les différentes liaisons. En contrepartie de ces engagements, l’État verse une subvention annuelle de 3 720 000 fr à raison d’un voyage par mois pour chaque destination. Une véritable manne pour la compagnie. Et en 1861, un décret impérial change le nom de la CGM en Compagnie Générale Transatlantique (C.G.T.), pour mieux correspondre à sa nouvelle fonction.
Quand en 1862 éclate la guerre civile au Mexique, Napoléon III décide d’engager, avec le Royaume-Uni et l’Espagne, des troupes contre la République du Mexique. L’Empereur voulait aider le pays à se donner un gouvernement indépendant et aussi rétablir une influence française au centre de l’Amérique et créer ainsi des débouchés commerciaux. Une nouvelle ligne vers Veracruz fut donc lancée en urgence à partir de Saint-Nazaire (attributaire des lignes vers l’Amérique Centrale) et avait pour mission le ravitaillement des troupes françaises et de faire une liaison constante avec la métropole.
Pour démarrer cette ligne rapidement la compagnie fait en premier lieu l’acquisition de 4 paquebots en Angleterre: Louisiane et Floride qui étaient neufs, Veracruz et Tampico qui étaient de construction récente.
Le premier départ de Saint-Nazaire vers Veracruz eu lieu le 14 avril 1862 par le vapeur Louisiane avec deux ans d’avance sur la date fixée par la loi de concession. Une fête somptueuse réunissant toutes les sommités régionales fut organisée.
Mais pour la suite… Quid ? La France n’avait pas à cette époque de chantiers navals équipés pour la construction de grands paquebots en fer comme il en existait en Angleterre. Ni le savoir-faire de ce type de construction. Il fallait donc en créer un.
Dans un premier temps, les frères Pereire s’adressent à la concurrence internationale contactant les chantiers britanniques, belges et hollandais et concluent en définitive, le 24 octobre 1861, pour trois bâtiments importants (Lafayette, Washington et Europe) avec le chantier écossais John SCOTT and Co de Greenock situé à l’embouchure de la rivière Clyde. Ce chantier est déjà passé maître dans la construction « fer » et depuis le 23 janvier 1860, la signature du Traité de libre-échange franco-britannique favorisait le transfert de technologie en matière de construction navale.
En savoir plus…. sur les chantiers John Scott & Co of Greenock
La presqu’île de Penhoët faisait, quand à elle, déjà l’objet depuis 1856 d’un projet de développement, initié par la chambre de commerce de Nantes (appuyée par le Conseil régional) et la municipalité nazairienne au travers de la construction d’un second bassin et d’éventuels chantiers navals en complément, pour les bateaux du futur concessionnaire de la ligne postale transatlantique.
C’est donc tout naturellement et fort du premier accord avec le chantier Scott, que la Compagnie Générale Transatlantique demanda à la municipalité le 26 novembre 1861 qu’une partie de ces terrains lui fût concédée. Tout alla ensuite très vite, les travaux de préparation (construction d’une digue du côté de la Loire et de quatre cales) mis en adjudication en avril 1862 étaient achevés en un an ce qui permettait aux frères Pereire de conclure un nouvel accord avec la société Scott pour être le concessionnaire du chantier et prendre possession du terrain. John Scott and Co – Chantiers de Penhoët était lancé et la nouvelle société aménagea à ses frais la construction des bâtiments et l’ensemble de l’équipement.
John Scott avait amené d’Angleterre un petit nombre d’ouvriers spécialisés et de contremaîtres, une quinzaine en tout. Il trouva sur place, dans la population de la Brière, une main-d’oeuvre déjà experte en construction navale bois, abondante et à bon marché. Il donna à cette population ouvrière locale les méthodes de travail sur le fer qu’elle ne connaissait pas et assura ainsi rapidement la renommée de Penhoët. Le chantier compta rapidement jusqu’à 2 000 employés. Pour les ouvriers qui venaient de l’extérieur John Scott réalisa en plus un ensemble de petites maisons pour les loger ainsi qu’une cantine.
Le premier navire en fer, à voiles et à vapeur, mu par des roues à aubes, de 108 mètres de long, 3 200 tonneaux et d’une puissance de 2 600 chevaux, dénommé Impératrice Eugénie (la femme de Napoléon III) fut lancé le 23 avril 1864 devant une foule considérable. Sa construction, malgré quelques retards, pris seulement 16 mois. Il était destiné à ligne de New-York à partir du Havre.
Cette date marque le début d’une longue histoire de constructions navales pour la ville de Saint-Nazaire.
Voici la liste des 16 premiers navires de la CGT affrétés sur les lignes postales transatlantiques, depuis Le Havre ou Saint-Nazaire :
D’autres navires furent construits sur le chantier de Penhoët pour la C.G.T. ou d’autres armateurs comme la compagnie Valéry qui faisait les liaisons Corse-Continent. Mais le contrat prévu lors de la concession des liaisons postales était donc rempli à la fin de l’année 1866, la moitié des 16 navires ayant été construits en France. C’était l’essentiel.
Malheureusement… les difficultés du Crédit Mobilier, plombé par une dette colossale, étaient mises au grand jour lors de l’annonce de son augmentation de capital courant 1866. Il s’agissait, ni plus ni moins que de le doubler, passant de 60 millions à 120 millions de francs afin de garantir une dette abyssale suite à des investissement immobiliers douteux (période des grands travaux Haussmanniens à Paris). Cette situation entraîna une défiance générale et la rumeur d’une faillite s’amplifia de jour en jour. Aussi en 1867, en quelques mois la valeur de l’action passa de 516 fr à 187 fr. Les petits actionnaires étaient floués, les gros étaient ruinés. Les frères Pereire quittèrent le « navire » en octobre de façon peu glorieuse et la faillite de la société fut prononcée quelques jours plus tard.
De son côté, John Scott qui avait accepté d’être payé par des actions de cette société fut directement touché et fit faillite en Ecosse en 1867 entraînant la fermeture du Chantier Scott « of Penhoet ». C’était la première crise que subissait Saint-Nazaire et les conséquences pour la population furent très lourdes en terme d’emploi. (P)
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En savoir plus sur…. le Crédit Mobilier et sa faillite
En savoir plus… sur la chute du chantier John Scott
Et pour ceux que cela intéresse… l’Histoire complète du chantier J. Scott à Penhoët
Malgré ces événements, la Compagnie Générale Transatlantique, sans les frères Pereire, pu intervenir auprès des créanciers de la sté Scott et négocia un concordat qui permit au chantier de redémarrer en mai 1868 (note de l’auteur: pas d’informations sur ce concordat). C’était le voeu ardent du Conseil municipal qui déclarait en août : « il n’y a pas en France de chantiers qui surpassent ceux de Penhoët… Il serait malheureux que cet outillage vint à se perdre faute d’emploi ».
La compagnie repris ainsi possession du chantier naval (que la Sté John Scott avait entièrement payé !) et pendant un certain temps pu convertir certains de ses plus petits navires en propulsion par hélice pour remplacer les roues à aubes d’origine. Puis elle loua en 1889 l’infrastructure au Chantier de l’Océan de Bordeaux qui construira pour elle un nouveau navire, Ville de Brest. Mais le déclenchement de la guerre avec la Prusse en 1870 et l’exil de Napoléon III, stoppera net ce début de reprise, le Chantier de l’Océan étant en faillite à son tour.
La destination industrielle de Saint-Nazaire paraissait irrémédiablement compromise.
Malgré tout la ville se développe…
De 1841 à 1846 ce fut la lente arrivée d’ouvriers qui allaient essentiellement travailler à la réalisation de la digue de ceinture du premier bassin.
Dès le commencement des travaux du bassin proprement dit, il fut nécessaire de loger cette population qui affluait alors en masse. Dès 1847 on établit des baraquements provisoires à proximité du chantier. Bâtis en pisé, en briques ou en bois, ces « cases », la plupart du temps en sol battu, blanchies à la chaux étaient dépourvues d’hygiène. Construites pêle-mêle, elles gênèrent souvent l’ouverture des rues et l’alignement entrepris plus tard. Leur expropriation fut même onéreuse pour la ville. (C)
Le grand développement de la construction privée commença avec la fin des travaux du bassin. D’août 1857 à août 1858, on compte 180 maisons neuves et 520 à la fin de 1859. Saint-Nazaire qui en 1846 ne comptait pour la partie urbaine que 161 habitations, toutes situées sur l’isthme rocheux, en avait 946 vingt ans plus tard (source : recensements archives de la mairie).
Quelques maisons furent édifiées dans ce qu’on appellera désormais la vieille ville et essentiellement sur la place face au bassin. La nouvelle ville devant se développer vers l’intérieur des terres, le long des routes de Saint-André et de Guérande.
De 1851 à 1866, en quinze ans, la population totale allait tripler (hors Méan-Penhoët), la population agglomérée plus que quintuplée. (G)
Cette rapide évolution de la population fut la conséquence directe de l’activité du port et du lancement du premier chantier naval qui construisit pas moins de 8 paquebots postaux transatlantiques entre 1862 et 1866. De 1846 à 1858 le nombre de navires entrant dans le port augmenta de 200%, le tonnage de 168 %. A partir de 1864, l’importation des houilles anglaises de la région de Cardiff assura à Saint-Nazaire un trafic important. La ville devint un très grand port charbonnier assurant ainsi le dixième des importations totales de la France.
Plusieurs plans d’urbanisation furent dressés. Dès 1845 par l’ingénieur Jégou (sans suite), puis par l’ingénieur Wattier en 1854, plan qui fut même homologué par arrêté préfectoral. Il prévoyait une enceinte fortifiée qui sera finalement abandonnée.
L’ingénieur Leferme en établit un autre qui fut accepté par le Conseil municipal le 5 décembre 1858. Il ne sera homologué qu’en août 1862.
Entre temps les constructions s’élevèrent de toutes parts ce qui valut à Saint-Nazaire l’épithète de « petite Californie bretonne » à l’instar de San Francisco qui se développait à grande vitesse avec l’arrivée des migrants venus de l’est. (C)
Voici globalement à quoi ressemble Saint-Nazaire en 1861: une vieille ville historique qui s’embellit avec une jolie place arborée (place de la Marine puis place du Bassin) et deux nouvelles petites rues et vers l’ouest une nouvelle ville qui se développe perpendiculairement au bassin nouvellement terminé.
La première voie structurante sera la rue Villes Martin en prolongement de la place de la Marine. Elle sera aménagée jusqu’à la place de Nantes (futur place Carnot) dans un premier temps puis ensuite vers 1867 prolongée jusqu’à la Briandais. (G)
La seconde voie structurante parallèle au bassin, la rue de Nantes (qui deviendra la rue Henri Gautier), démarrera de la place du même nom et sera perpendiculaire à la première en direction du nord. Elle sera la plus longue, la plus habitée et la plus commerçante. Deux hôtels-restaurants, la Croix d’Or et le Cheval Blanc étaient construits sur cet axe. On y trouvait également une charcuterie, une horlogerie, une mercerie, un magasin de fleur, une cordonnerie, une armurerie,…(G)
On remarque déjà la physionomie générale « orthogonale » de la future nouvelle ville de Saint-Nazaire avec ses rues à angle droit. Seules exceptions : la rue de Saillé qui était le point départ autrefois de la route du Croisic et les rues du Calvaire, du Prieuré et de Méan, en arc de cercle correspondant à la route de Guérande qui longeait l’anse de la Ville Halluard et passait par Méan (voir carte en haut de page).
Vers l’ouest, une première extension se faisait jour au niveau du quartier de Maudes, avec trois petites rues : Petite-Bretagne, Grande-Bretagne et la rue du Traict, ces dernières débouchant sur les dunes. (G)
En dehors de ces quelques rues on trouve des habitants dans des « villages » où les rues sont incomplètement tracées ni même dénommées: Ville Aubry, Ville Es Table, Ville Halgand, Bois Savary, Dermurie,…. (G)
Avec tous ces nouveaux habitants la ville a du mal à s’agrandir correctement. Les hésitations et incertitudes caractérisent le développement anarchique des constructions, parfois établies à partir de cadastre napoléonien sans alignement. (G)
De plus cette expansion démographique devait inévitablement déclencher une spéculation effrénée. Ainsi des terrains situés à proximité du bassin qui valaient en 1847, deux à trois francs le M² étaient montés à cinquante francs en 1858. (C)
Plusieurs sociétés immobilières, à vocation spéculative, furent créées : Salamanca et Chatelus (deux banquiers), la société du Bois-Savary (du nom d’une ancienne ferme), la société des Paquebots à Vapeur, la société des Crédits Généraux et surtout la « Saint-Nazaire Company Limited » constituée en 1963 selon la loi anglaise avec un capital de 600 000 livres. Elle était représentée par un armateur, Alphonse Cézard, propriétaire d’une grande étendue de terrains sur les dunes. (C)
Il proposa à la municipalité la création d’un vaste programme immobilier, d’un quartier tout neuf en bordure de mer et parmi les pins. Une nouvelle ville distincte de l’autre, dessinée par l’architecte Opperman, avec des boulevards, une église monumentale, un théâtre somptueux, une caserne, un collège… des halles, un abattoir, un lavoir et des bains publics. (C)
Les premiers travaux sur le front de mer furent entrepris au cours de l’année 1865. Mais cette même année, la « Saint-Nazaire Company Limited » se transformait et était remplacée par la « Société du Commerce de France » qui avait des liens financiers avec le Crédit Mobilier, des frères Pereire. Elle reprenait globalement le projet de 1864 en limitant cependant les nombreux bâtiments projetés.
Mais en juillet 1866, suite aux problèmes du Crédit Mobilier elle fut déclarée en faillite. Elle ne fut pas la seule, de nombreuse fortunes s’effondrèrent aussi vite qu’elles s’étaient créées et les années 1867 et 1868 furent émaillées de nombreuses faillites. (C)
En savoir plus sur… l’essor du système bancaire français et de ses conséquences.
Avant le projet Opperman, d’autres architectes avaient « planché » sur le devenir de la ville de Saint-Nazaire, notamment une société anglaise « Lebaudy, Lowe et Cie » que nous devons mentionner tant leurs propositions fut, pour le moins, osées.
Note de l’auteur: convenons qu’avec ces deux projets nous avons réellement évité le pire.
Mais revenons au plan de l’ingénieur Leferme, qui prévoyait des artères se coupant à angle droit et des places aux croisements les plus importants. Il est finalement approuvé en 1863 et va remettre un peu d’ordre dans la construction des logements. D’autant que depuis le 18 octobre 1859, un arrêté préfectoral prescrit le numérotage des maisons. Un service de nettoyage des voies publiques urbaines est également organisé à partir du 3 mars 1861.
Bien que la gare ne soit pas encore construite, en juin 1857, pour la première fois le train à vapeur arrive à Saint-Nazaire mais sans pour autant supprimer la Poste aux Chevaux et le transport par diligences. Ces dernières, venant de Guérande et du Croisic assuraient la correspondance avec le train ou le pyroscaphe (navire à vapeur) qui avait un service journaliers avec Nantes par la Loire.
La ligne ferroviaire Nantes-St Nazaire de la Cie du Paris-Orléans sera inaugurée le 10 août 1857.
En 1860, l’usine à gaz est inaugurée ; jusqu’à présent les rues étaient éclairées, plus ou moins bien, à l’huile. La rue Villès Martin est prolongée jusqu’à la Briandais. Le nouvel Hôtel de ville (architecte Lhotelier) lancé en 1855 est presque fini.
En 1865 deux groupes de rues étaient ouvertes : tout d’abord la rue de Penhoët, la rue du Dolmen, la rue de la Paix et d’un autre côté, la rue de Paris, la rue d’Anjou et la rue du Maine.
En 1867 et 1868 ce sera au tour de la rue de la Guerre, de l’Artillerie (le projet d’une ville fortifiée est toujours là), du Bois Savary, des Caboteurs de se développer.
Au nord le quartier de Penhoët, avec le chantier naval, s’était développé au détriment de Méan qui perdait peu à peu son prestige maritime. En 1865, l’ensemble Méan-Penhoët groupait 264 maisons et 2 524 habitants, pour la plupart ouvriers aux Chantiers, mais qui, administrativement, dépendaient de Montoir et devaient se déplacer jusqu’à la mairie de ce bourg pour la moindre formalité. Aussi, la loi du 13 mars 1865 détacha Méan de Montoir pour l’annexer à Saint-Nazaire.
Nous pouvons aussi noter les premières courses hippiques en 1864 dans la zone du grand marais praticable en saison sèche avec son hippodrome équipé de tribunes démontables.
Contrairement à St Sébastien de Pornichet qui deviendra une commune indépendante à la fin du siècle, l’Immaculée, nouvelle paroisse sur le domaine du Bois Joalland en 1857 restera dans le giron de la commune nazairienne et ce malgré deux avis favorables du Conseil municipal en 1861 et 1872.
Il manquait par contre toujours à Saint-Nazaire un vrai établissement de soins. Au début des travaux du port, les habitants et ouvriers malades ou blessés devaient être transportés à Paimboeuf ou Savenay. Or il existait à Penhoët un lazaret bien organisé et peu utilisé ; il devint en 1857 un hôpital provisoire avec deux religieuses pour assurer les soins. Mais ce n’était pas suffisant pour une ville qui se développait aussi rapidement et dès 1858 un nouvel emplacement était réservé dans le quartier de la Briandais. Le bâtiment, bien équipé, sera achevé 10 ans plus tard.
A noter enfin le transfert de la sous-préfecture de Savenay à St Nazaire en 1863 et la création d’une Chambre de Commerce en 1879 qui gérera notamment l’outillage public du port. La ville avait maintenant tous les outils administratifs et économiques pour continuer à se développer…
… même si, suite à la fermeture du chantier naval Scott en 1867, de nombreuses familles avaient quitté Saint-Nazaire et étaient retournées pour plusieurs d’entre elles dans leur Brière natale. Ainsi en 1870, quatre ans après le recensement de 1866 la population totale de la commune, avec l’ajout de Méan, n’avait quasiment pas évoluée et se situait autour de 17 000 personnes, soit quand même le triple de la population de 1856 !
Mais cette stagnation n’allait pas durer très longtemps.
La construction d’un deuxième bassin
En 1856, le bassin de Saint-Nazaire n’est pas encore mis à la disposition du commerce et déjà son insuffisance est patente pour tous.
Mais encore une fois il allait être difficile de se mettre d’accord… Le département de la Marine n’avait pas vraiment abandonné l’idée d’une ville fortifiée avec des quais pour ses navires, la Cie d’Orléans dont la ligne Nantes-St Nazaire allait bientôt être inaugurée souhaitait avoir un quai pour y installer une gare maritime et la Chambre de Commerce attendait de son côté une augmentation du trafic marchandises.
Le Conseil municipal de Nantes, le Conseil Général, la Chambre de commerce de Nantes émettaient tous le même voeu : étendre les quais dans le prolongement du premier bassin. Devant cette instance unanime, le ministère des Travaux Publics ordonna des études minutieuses dans ce sens. Exit donc le bassin intérieur prôné par le ministère de la Guerre.
Finalement, le Conseil municipal se prononça le 18 juin 1857, à l’unanimité mois une voix, pour l’établissement d’un nouveau bassin dans l’axe du premier en direction de Penhoët.
Plusieurs projets furent étudiés dont les deux précédemment cités de la Sté Lebaudy, Lowe et Cie (voir plus haut). C’est finalement l’avant-projet présenté par l’ingénieur Leferme le 30 janvier 1860 qui reçut le meilleur accueil. Il prévoyait en sus du deuxième bassin une possible extension vers Méan, avec des darses pour la réparation et un troisième bassin communiquant avec le Brivet permettant ainsi une sortie vers le Nord.
La commission d’enquête administrative, réunie le 8 novembre 1860, adopta les propositions de l’ingénieur en chef Chantoney , qui avait déjà validé le projet Leferme, en insistant sur la nécessité d’une exécution immédiate ! Il n’y avait plus qu’à obtenir l’autorisation du gouvernement.
Le décret impérial tombait le 5 août 1861 déclarant d’utilité publique la construction d’un deuxième bassin à Saint-Nazaire. (C)
Pour libérer l’emplacement du nouveau bassin il fallut déplacer la route départementale entre Savenay et Guérande et plus problématique, procéder à des expropriations dans la presqu’ile de Penhoët.
Une première tranche fut adjugée en 1862, comprenant le creusement du bassin lui-même et l’établissement de la partie correspondante des chantiers de construction, projetés 15 ans plus tôt, dont une partie était à conquérir sur la mer avec le remblai du creusement.
Ensuite eut lieu l’adjudication, en 1864, d’un lot beaucoup plus important techniquement : la construction d’une écluse de communication entre les deux bassins, devant servir provisoirement de forme de radoub pour l’entretien des navires, notamment ceux de la Cie Générale Transatlantique. Malheureusement le déblocage des crédits fut assez lent et l’ouvrage ne fut terminé qu’en 1873 avec une première occupation d’un paquebot en décembre. (C)
Mais le creusement du second bassin, lui, n’avançait pas…
Petit rappel historique : nous sommes à la charnière entre le Second Empire et la 3ème République. Les travaux ont été lancés sous Louis Napoléon Bonaparte (Napoléon III) mais suite à la défaite de Sedan contre la Prusse le 2 septembre 1870, il fut fait prisonnier et dut s’exiler en Angleterre. Deux jours plus tard, Léon Gambetta proclamait la 3ème République. Autant dire que cette période troublée n’a pas vraiment aidé les prises de décisions et les déblocages des crédits…
Finalement en 1875 les travaux du bassin reprirent activement et l’inauguration put avoir lieu, en présence de Sadi Carnot, ministre des Travaux Publics (et futur Président) le 8 mai 1881. Ce fut un jour mémorable pour Saint-Nazaire.
Quelques travaux restaient à terminer, comme l’installation d’un pont roulant sur l’écluse (une première en France), la construction des voies ferrées autour du nouveau bassin et l’élévation des hangars et des grues. (C)
Le port de Saint-Nazaire était désormais doté de tous les bassins et outillages nécessaires à son développement.
Entre la construction du Môle en 1835 et l’inauguration du second bassin en 1881, il aura fallut moins d’un demi-siècle pour transformer un port d’échouage primitif en un grand port moderne. Une évolution unique dans notre Histoire maritime.
Et ce n’était pas fini….
Bonjour cher monsieur,
Je suis arrivé par hasard sur votre site. J’apprécie la qualité de votre documentation et la précision des informations.
J’écris actuellement un livre sur Jean d’Ust et le Saint-Nazaire de la fin du 14e siècle.
Le plan retrouvé par Goinard que vous publiez est exceptionnel. J’aimerai examiner l’original si vous le possédez ou avoir les références parce qu’il y a des mentions manuscrites que je n’arrive pas à lire.
De plus, je souhaite l’introduire dans mon livre si vous m’y autorisez.
Nous pourrions convenir d’un rendez-vous.
J’habite au .. rue de Stalingrad. 07 .. .. ..
Cordialement
Bonjour M. Morinière,
je vous recontacte par mail
Cdlt
H. Guével
Bravo et merci pour le partage de votre travail sur l’ histoire de la ville. je n’ ai pas fini de le parcourir mais j aurai déjà un autre regard lors de mes promenades à Saint Nazaire. En plus des illustrations détaillées, votre récit est très interressant et je vais de découvertes en découvertes.J ‘ai hate d’ en découvrir la suite.
Merci pour votre message et votre appréciation. C’est ma plus grande satisfaction de voir que les nazairiens re-découvrent un peu leur ville.
Quelques sujets, comme par ex le St Nazaire social des années 50/60, mériteraient aussi un développement. Je pense qu’il y aura ainsi quelques mises à jour…
Bien cordialement. H.G.
Magnifique travail, une ressource de recherches pour les amateurs d’histoire.
Je recherche désespérément un lien qui puisse me donner l’histoire de M.
Henry Despecher qui fonda l’usine à gaz de St Nazaire avec M. Duval. Je
recherche principalement son activité à Fégréac au lieu dit Le Bellion.
Vers 1871/72 Henry Despecher y créa une usine métallurgique qui fonctionna
jusqu’en 1884.
Un grand merci si quelqu’un pouvait m’éclairer dans mes recherches.
Bien votre site mais il manque un chapitre sur la préhistoire et les vestiges (comme dissignac) qui aurait eu sa place en avant-propos…
Oui je comprends votre remarque. Et j’y ai pensé…
Mais deux raisons: d’abord cela rajoutait du texte sans vraiment d’illustration, ni surtout d’écrit et puis cette période n’apportait rien concernant le développement de la ville. J’ai donc fait l’impasse.
Maintenant si vous avez quelque chose à me donner, je veux bien étudier le rajout.
Cdlt