Construction de l’avant-port

Pour ceux que la technique intéresse et qui auront le bonheur de tout comprendre (!), nous reprenons ici le texte intégral de Marthe Barbance dans son livre « Saint-Nazaire, le port, la ville, le travail » (page 111), texte lui-même repris des écrits de René Kerviller.

Les jetées furent construites à l’air libre ou comprimé suivant la cote du rocher de fondation.

Sur environ 400 mètres de profondeur, elles peuvent être fondées directement à la marée, à sec sur le rocher. Sur le reste de leur développement elles sont assises à la cote (+0.93) sur des massifs de fondation à section rectangulaire ayant huit mètres de large et onze mètres vingt de long et d’une hauteur variant avec la profondeur du rocher. Les cotes d’implantation varient de (-1.30) à (-9.27) pour la jetée Est et de (-0.85) à (-7.97) pour la jetée Ouest. Tous ces massifs ont été fondés à l’air comprimé. On avait eu soin de ménager à l’extrémité de la jetée Ouest quatre baies de 10 m d’ouverture, bloquées en maçonnerie pleine; elles pouvaient être ouvertes si la pratique en montrait la nécessité pour remédier éventuellement à l’effet dangereux des courants traversiers à l’entrée de l’avant-port.

Les jetées en maçonnerie pleine ont la section d’un trapèze isocèle dont la base supérieure a 5 mètres de largeur et les faces un fruit de 1/6. Elles ont été construites en moellons granitiques provenant de Saint-Nazaire et de Lavau, les parements étant en moellons rustiques et régulièrement assisés. La plate-forme supérieure est établie à la cote (+7.43) soit à 1,53 m au dessus des plus hautes mers, elle est défendue du côté du large par un parapet de 1,50 m de hauteur et 1,50 m de largeur, il reste 3,50 m pour la circulation.

Le batardeau présentait le même profil que les jetées, mais comme il était un ouvrage provisoire, des trous de mine verticaux furent réservés dans sa maçonnerie pour permettre de le démolir suivant quatre tranches horizontales à la fin des travaux. On y avait aussi aménagé le logement de trous de vannes de 1,20 m de large sur 2 m de haut établies de manière à permettre l’écoulement directe dans la grande rade des eaux remplissant l’avant-port au dessus de la cote (+0.80).

Chacun des caissons amovibles était formé d’une caisse métallique de 12 m de long sur 9 de large. La hauteur était divisée en deux parties par une planche étanche horizontale. La partie inférieure, de 1,90 m de hauteur, constituait la chambre de travail, la partie supérieure était divisée en plusieurs compartiments servant de sas, de logement pour un compresseur ou de water-ballast.

Pour travailler en caisson on commençait par décaper le rocher en enlevant le sable la vase et la roche décomposée; la maçonnerie était ensuite exécutée et le caisson soulevé au fur et à mesure de l’avancement au moyen de vérins. Lorsque les maçonneries étaient arasées à la cote (+0.93), le caisson était délesté et déplacé de sa longueur pour un nouveau fonçage. Le fonçage s’effectuait en remplissant d’eau quatre water-ballast situés immédiatement au dessus de la chambre de travail. Le déplacement du caisson s’effectuait, au début, à la marée haute, au moyen d’amarres frappées sur des bouées convenablement mouillées.; mais à la suite du renversement d’un des caissons dont le relevage et la réparation durèrent 5 mois, ce procédé fut abandonné.; le caisson fut alors maintenu entre deux chalands reliés entre eux et soutenus au moyen de six chaines actionnées par six treuils de levage placés sur chacun des deux chalands, la sécurité des déplacements, descentes et ascensions des caissons fut ainsi à peu près absolue. les pertuis entre deux massifs contigus furent fermés à l’aide de paleplanches ou de murettes en sacs de béton, du ciment étant coulé entre paleplanches et murettes sans d’ailleurs fournir une jonction aussi étanche qu’on l’avait désiré (Kerviler, Mallat, Le Trocquer).